Ainsi les électeurs américains ont-ils choisi de confier toutes les clefs du pouvoir non pas à un chef d’Etat tel qu’on le conçoit dans la plupart des Etats-Nations mais à un personnage qui se prend et ressemble à une sorte d’« imperator ». Dans la qualification de « République impériale » dont on pouvait affubler leur pays, ils ont fait pencher la balance et sorti les Etats-Unis de leur dualité en se rangeant sans ambiguïté du côté impérial ; certes, un empire aussi maritime que continental, aussi disparate sur le plan ethnique qu’idéologique, mais un empire financier, technologique, militaire sans rival sérieux. Ce faisant et sans probablement en avoir conscience, ils ont accéléré la redistribution des cartes mondiales : là où, jusqu’à présent, l’Amérique était alliée des Etats-Nations et rivale des Empires, elle risque d’inverser les rôles en devenant partenaire des deux grands Empires et rivale des Etats-Nations concentrés pour l’essentiel en Europe. En effet, dans la lutte séculaire entre Empires et Etats-Nations, la conception du pouvoir et la vision de l’Amérique de Donald Trump le conduiront sans doute à se comporter au moins comme un monarque parmi ses collègues autocrates Poutine et Xi dans le marigot que fréquentent ces grands sauriens. Le nombre et le poids des Etats-Nations mus plus par « le droit » que par « l’intérêt » vont se réduire fortement car Trump va faire des émules et encourager les apprentis dictateurs et populistes du monde entier. L’Europe, déjà malade d’une anémie démocratique, risque de se trouver bien seule pour préserver la survie de l’Etat-Nation.
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