Dans son rapport mensuel, l’Agence Internationale de l’Énergie a réduit sa prévision de demande mondiale de pétrole cette année à 250 000 barils par jour, en raison de la diminution des attentes de croissance de l’économie mondiale.
Depuis août 2014, nous observons des changements dans le panorama énergétique mondial, notamment à travers la chute prononcée du prix du pétrole. Cela n’a qu’une explication, rien d’inusité, les quantités de pétrole produites sont plus volumineuses que celles que le marché mondial peut absorber.
Or, souvenons-nous, en mars 2011, le Président Barack Obama avait fixé comme objectif de réduire les importations de pétrole des États-Unis de 30 % à l’horizon 2025. Pour ce faire, il annonçait l’augmentation de la production domestique et des efforts pour la diminution de la consommation. Grâce notamment au fracking hydraulique, dès 2004, les États Unis ont pu augmenter la production pétrolière sur leur territoire.
Bien qu’ils importent encore environ 8 millions de barils par jour, la hausse de la production nationale a réduit les besoins externes et, par conséquent, créé un surplus sur les marchés internationaux.
Pour les pays producteurs traditionnels de pétrole, cette nouvelle conjoncture représente une sérieuse préoccupation dans le court terme. La solution paraîtrait évidente à première vue de diminuer la production pour faire monter le prix. Néanmoins, l’OPEP qui regroupe à peu près 40 % de la production mondiale, n’est pas prête pour intervenir comme c’était le cas lors du conflit de Yom Kippour en 1973. L’Arabie saoudite négocie avec les pays d’Asie pour leurs approvisionnements, refusant de perdre sa part de marché. L’Irak et la Libye ont augmenté leurs productions.
Les variables à prendre en compte dans l’évolution du prix du pétrole seront étudiées à Vienne, en novembre 2014, quand l’OPEP prendra une décision à partir de cette conjoncture.
Dans le contexte financier, il faut tenir compte des « pétrodollars » des grands exportateurs, qui peuvent générer de l’inflation. Par conséquent, si le dollar se déprécie, leurs détenteurs subiront une forte perte de pouvoir d’achat. A l’inverse et pour coller à la conjoncture actuelle, si le prix du pétrole descend de manière substantielle, la valeur du dollar augmentera avec une incidence directe dans le Forex. Voilà ce qui relève de la corrélation systémique dollar/pétrole, la zone Euro devra être attentive et anticiper des ajustements.
Les BRICS commencent à exclure le dollar dans leurs transactions pour la vente des commodities, ils considèrent d’ores et déjà le nouveau rôle des Etats- Unis dans la carte du marché pétrolier mondial.
Commentaire stratégique :
Aux arguments évoqués ci-dessus par Luis Avila – moindre croissance mondiale, exploitation du gaz de schiste américain -, il faut en ajouter au moins deux : la montée en gamme et en volume des énergies renouvelables, la maîtrise des consommations (transport et chauffage) sur le plan technique ; le jeu géopolitique supposé de l’OPEP et, surtout, de l’Arabie saoudite qui trouverait son intérêt au maintien de prix très concurrentiels.
Non seulement la baisse du prix du pétrole était prévisible depuis plusieurs années, mais ses conséquences financières et budgétaires étaient calculables. Ni la Commission européenne ni le gouvernement français n’ont anticipé ces événements qui auront nécessairement des incidences sur les divers tableaux de bord.
Encore un exemple du court-termisme et de la faillite de l’analyse stratégique alors que tous les éléments d’appréciation étaient à la disposition de soi-disant experts.
* Expert IPSE.