La chute des prix du pétrole
Le cours du pétrole ne cesse de dégringoler depuis le mois de juin pour atteindre les prix les plus bas depuis cinq ans. Le prix de vente du brent a perdu 26 % en l’espace de cinq mois, et la décision fin novembre de l’OPEP de maintenir en l’état les quotas de production laisse présager que la chute n’est pas finie.
De ce fait découlent des conséquences considérables dans le domaine de l’énergie, dont l’une d’elles est la question de la rentabilité à terme des énergies non-conventionnelles. Le choix de l’OPEP permet de grignoter les parts de marchés perdues face à celles-ci.
Une énergie essentiellement nord-américaine
Symbole de la reprise de l’économie américaine en apportant une énergie à bas coût, la révolution des gaz de couches (schiste) paraît s’essouffler. Avec un prix de pétrole bas, les rêves d’indépendance énergétique s’éloignent. Pour le comprendre, il faut remonter aux prémisses de cette industrie.
Connus depuis le XIXe siècle mais jugés trop coûteux à l’extraction, les gaz de couches n’étaient jusqu’à la fin des années 1990 pas ou très peu exploités. Comme les « majors », grandes multinationales du pétrole, s’en détournaient, le début de l’exploitation de ces ressources à la fin des années 1990 est le fruit d’initiatives de petites et moyennes entreprises. La forte hausse des prix du pétrole en 2008 a accru leur rentabilité. Il était devenu moins onéreux de creuser toujours plus profond, montrant par là-même le caractère quelque peu absurde des marchés énergétiques.
En Amérique du Nord, en 2008, le prix du baril atteignait 140 dollars, ainsi le million de Btu de gaz se vendait à 13 dollars. En 2012, lors de cette « révolution américaine », ce dernier oscillait entre 5 et 8 dollars, et en 2013 avec un prix moyen de 4 dollars par million de Btu, les prix américains étaient environ trois fois moins élevés qu’en Europe. Des prix qui inquiétaient l’OPEP.
Une attaque directe contre le schiste américain
La crise économique a favorisé le recours aux énergies non-conventionnelles, et les gouvernements nord-américains ont véritablement facilité le développement de cette nouvelle industrie, qui a permis la reprise économique des Etats-Unis. Toutefois le pays s’y est engouffré à plein, dépendant aujourd’hui à 30 % des énergies conventionnelles. Or le seuil de rentabilité se situe à 75/80 dollars pour un baril ; aujourd’hui il s’échange à 57 dollars. Si cette situation perdure, beaucoup de producteurs feront probablement faillite, et les pronostics faisant des Etats-Unis la prochaine première puissance énergétique du monde auront été un peu trop ambitieux.
* Antoine Rivière est chercheur associé à l’Institut Prospective et Sécurité en Europe – IPSE.