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Le Gouvernement du désir

Hervé Juvin – Le débat, Gallimard, 2016

« …Le capitalisme libéré du réel par la finance de marché n’a pas de plus bel allié que le désir sans fin, pas de plus docile esclave que l’homme désirant sans fin. La libération aura servi à ça ; mettre le désir humain au service de l’ordre de la société de l’individu. Multiplier le désir, voilà à quoi nos sociétés s’emploient, avec un enthousiasme qui en effet change le monde, les vies, et bouleverse deux ou trois choses que nous croyions savoir de l’économie, de la société et du pouvoir.

…Le premier produit de l’industrie, des services, du commerce, dans la société libérale contemporaine, n’est rien qui se consomme, qui se vende et qui s’achète…C’est le désir. La finance s’y emploie dans son duo infernal avec les médias, moins pour saper tous les pouvoirs que pour anéantir toute limite au désir – tout le libéral-socialisme tient dans ces suppléments hebdomadaires et glamours aux quotidiens comme Le Monde…Ce que produit l’économie classique, c’est le désir, qui achève de façonner l’individu formaté, normé, calibré, aux préceptes de l’économétrie. Ce que produit l’entreprise privée, c’est le désir. Ce qu’excitent les politiques publiques, c’est le désir. Ce qu’invoquent les politiques…, c’est le désir…L’individu modèle, le type idéal, c’est l’homme désirant sans fin…L’individu voué à son désir est le pilier d’un être-ensemble qui exclut à juste titre toute discrimination, toute hiérarchie, tout jugement sur la nature de ce désir…L’invention du sujet désirant sans fin, puis sa production industrialisée et mondialisée, est le fait décisif de la modernité. Son principe d’ordre ; et son régime de gouvernement…Elle caractérise la fabrique de l’individu, sorti de son corps, de sa matérialité de chair, d’origine, de culture et d’histoire, pour devenir être de droit, abstrait, donc sans limites, une page blanche sur laquelle la société de l’économie peut écrire ce qu’elle veut, pur appétit que l’argent jamais ne rassasiera.

Cette révolution moderne, celle de l’individualisme libéral, déjoue bien des analyses, bien des attentes. Car le désir du produit, le désir de la richesse, n’a pas besoin d’être mimétique, il appelle au paradis des bonheurs solitaires. Car il est délivré des affres du péché originel, de la faute et de la rédemption, il est pur délice d’attente, de représentation et de satisfaction imaginaire, appropriation de tous les possibles, sortie de toutes les limites que l’usage du monde enseignait à ses pratiquants prudents.

[…] Les désirs des hommes sont le moyen de l’économie et de la croissance, ces deux principes d’ordre qui fondent la politique – ou ce qui en tient lieu. En produisant le désir, l’économie s’autoproduit et s’auto-institue. La révolution de l’individualisme libéral a réalisé ce que ni le stalinisme, ni le fascisme, ni le nazisme n’étaient parvenus à faire : créer un homme nouveau, l’homme désirant sans fin. Elle l’a fait au nom de l’économie, en substituant à tous les objets du désir le moyen qui les promet tous, l’argent…Voilà longtemps que ce n’est plus le besoin qui fait marcher nos économies…Voilà longtemps aussi que la loi du consommateur n’est plus qu’une fable pour étudiants de première année en macroéconomie. Un constructeur automobile, un fabricant de crèmes de beauté….n’ont plus pour première activité, distincte, de produire des automobiles….mais comme activité commune de produire le désir des clients pour leurs produits…En réalité, c’est la théorie de l’équilibre général, pilier de l’économie classique et dogme fondateur du libéralisme financier, que subvertit la production du désir.

[…] Pour permettre au désir de s’accomplir, c’est-à-dire de disposer immédiatement de ce qui devait venir plus tard, pour assurer à l’individu désirant sans fin une perspective ouverte sur un enrichissement illimité, il fallait un dispositif puissant et bien établi qui se joue du temps. C’est le crédit. Le crédit n’est pas l’un des instruments de la modernité libérale, il en est l’instrument. Le crédit rend actuel ce qui était à venir. Le crédit fait du temps une marchandise comme une autre ; pour qui considère que l’espace du temps, de l’attente, est la clé du désir, acheter du temps signifie payer le désir et lui donner son prix. Le crédit supprime l’espace infernal de l’attente entre le désir et sa réalisation…Sans le crédit, rien n’est possible. Ni la surconsommation d’énergie, ni la folie de la mobilité, ni l’explosion du luxe, directement connecté à l’explosion de la sphère financière – à la nouvelle colonisation du monde.

Et, dans le même temps, le crédit est principe d’ordre. Plus que la monnaie, plus que le patrimoine ; car il tient l’avenir. Le crédit est ce qui assure l’ordre dans la société des individus, l’ordre de promesses tenues et à tenir, contre le désordre des promesses trahies… Ce n’est pas pour rien que l’endettement public est devenu le premier outil de l’ordre international…

Quand un Etat s’endette à l’extérieur, et quand cette dette extérieure représente une part importante de l’activité nationale (…), cet Etat lie la nation à des intérêts qui lui sont extérieurs, qui poursuivent leur propre logique, et qui peuvent lui être hostiles. Il crée une situation dans laquelle la nation est dépendante, sa souveraineté limitée, sa légitimité sous contrôle de la tenue de ses engagements financiers auprès de ses créanciers… L’économie du désir s’applique aussi aux Etats, et peut-être davantage, tant la société de l’individu fait du politique le marché des promesses…. Le crédit est un anesthésique social puissant, un euphorisant pacificateur efficace….Dans la production du désir, le crédit joue un rôle essentiel. Le crédit crée la monnaie, cet instrument universel de la satisfaction du désir. Et ce n’est pas par hasard que la prise de contrôle des institutions financières, des banques et des grands détenteurs de capitaux sur les juges, les régulateurs et les contrôleurs, engagée dans les années 1970, a abouti au gonflement de la plus gigantesque bulle de crédit public et privé que le monde ait jamais connu ; le crédit est le grand redistributeur de la richesse et du pouvoir, le crédit est le moyen le plus efficace jamais connu de détruire les classes moyennes – le crédit, et l’usure…. Le crédit est l’instrument privilégié qu’emploie le désir pour devenir système de pouvoir, le crédit qui réalise ce vœu le plus cher de tout être humain devant la mort : acheter le temps, et défier la Parque qui tient le fil.

Le crédit fabrique une société de l’obéissance. L’endettement prépare l’esclavage ; interdiction de quitter son travail, interdiction de discuter, remboursez d’abord !… Le crédit à la consommation permet de compenser la stagnation historique des salaires et l’insécurité croissante du marché du travail. Endettez les pauvres, ils seront tenus, aussi tenus que l’étaient les esclaves incapables de se racheter auprès de leur propriétaire….

…les grands tenanciers du crédit ont favorisé le surendettement des Etats, de manière à mettre sous tutelle – leur tutelle – les politiques publiques. A cet égard, la performance, dans l’absolu remarquable, de l’Agence France Trésor, est dans la réalité un mauvais coup porté à l’indépendance nationale ; mieux vaudrait que la dette publique se paie, cher, et s’exporte moins ! Pour quelques points de taux d’intérêt en moins, l’Agence a vendu la souveraineté budgétaire de la France !

…La boucle se referme, l’individu désirant sans fin est pris au piège qu’il s’est complu à refermer sur lui, et le système est dispensé des grandes machines idéologiques, politiques, religieuses, qui prétendaient unir les membres d’une société par le haut – la foi, la crainte et l’autorité. Le crédit joue le rôle que le garde-chiourme jouait naguère…

[…] La production du désir met à mal l’économie classique, elle déclasse plus encore ce que nous croyons savoir sur la démocratie et le pouvoir. Car il ne s’agit plus de faire tenir ensemble, et progresser ensemble, des hommes et des femmes tels qu’ils sont, sur un territoire tel qu’il est, il s’agit de fabriquer des individus dans un univers indéterminé que seuls caractérisent des nombres et des fonctions…

…Le gouvernement du désir commence par ce pouvoir inouï : le pouvoir d’amener à l’existence les choses, les êtres, les relations, en les faisant entrer dans l’ordre du désir, et le pouvoir symétrique de dénier à des faits, des opinions, des situations, leur existence même, quand ils contredisent la machine désirante. Des statistiques de l’immigration à celles du chômage et de la délinquance, défendu d’y aller voir !

[…] La réalité qui se fait jour est pourtant sans appel. L’individu moderne tient debout grâce au squelette invisible que l’Etat, la loi, la technique, les institutions, ont mis quelques siècles à construire. Et plus il se veut libre…, plus il est dépendant de l’appareil invisible qui fait tenir le monde autour de lui… L’oubli de l’histoire qui berce encore l’Europe annonce simplement qu’il faudra encore des morts, des guerres, des invasions, des résistances pour que quelque chose comme de la liberté existe…Et le mythe de l’autocréation des soi devient la fondation d’une religion moderne, totalitaire et intolérante, la religion des droits de l’homme, qui achève de mettre à mettre à disposition de l’ordre du désir les individus délivrés de leur identité. L’autocolonisation serait-elle le mythe caché de la repentance européenne ?

C’est ainsi que la société de l’individu, la société de la croissance, est aussi la société de l’obéissance – et de la corruption des mœurs, des lois et des esprits…Le système du désir repose sur le consentement de tous, sur la participation volontaire de chacun.

[…] La production du désir a sidéré des individus fatigués d’être citoyens, si bien lotis de biens publics qu’ils leur devenaient indifférents ; ils les tenaient pour acquis ! Une identité assurée, une citoyenneté partagée, la sécurité à l’intérieur et la paix à l’extérieur considérées comme des acquis de l’histoire, voilà la scène sur laquelle le désir de biens privés et des satisfactions marchandes a pu prospérer, voilà ce qui a permis la révolution moderne instituant la société de l’individu d’arriver à son terme. La société de l’individu tient chacun par son intérêt et se gouverne par le désir… La passion de leur intérêt individuel tient les membres de la société libérale ensemble plus étroitement que n’importe quelle autorité venue d’en haut !

[…]…la fin de la croissance comme nous l’avons connue, comme elle a assuré le gouvernement du désir depuis deux générations, comme elle a assuré la fascination pour l’Occident, ses œuvres et ses pompes, n’est pas un fait économique, mais bel et bien un fait de civilisation. Et son origine n’a pas grand-chose à voir avec la finance, la banque et l’industrie, pas plus qu’avec la crise de 2007-2008 qui en a été tout au plus le révélateur. Comme toujours, l’économie est déterminée par ce qui n’est pas elle et qui ne vient pas d’elle. Et le malaise dans la civilisation de la croissance est l’effet d’une déception qui grandit, qui se généralise et qui menace d’éclater, une déception qui touche aux fondements mêmes du gouvernement du désir.

La déception devient l’effet le plus répandu de la production du désir par l’économie et de sa forme banale, la gestion de l’insatisfaction…. Mal français, dépression européenne, malaise américain…L’économie qui nous promettait la croissance, et tout ce qui s’ensuit, nous a engagés sur une fausse route. Non seulement les promesses de la croissance ne sont pas tenues, mais cela même que l’on croyait tenir, cela même qui semblait acquis, est remis en cause et semble tout à coup faire défaut. Non seulement la croissance promise n’est pas au rendez-vous, mais nous sentons que, serait-elle là, les dommages qu’elle provoque seraient incommensurables par rapport aux quelques bénéfices réels que nous en pourrions retirer. Non seulement nous ne sommes pas ce consommateur insatiable qui fournit le moteur de la croissance exigée, mais nous sommes trop souvent ce consommateur déçu que l’on n’y reprendra plus.

[…] La société de l’histoire était la société de la croissance ; faire l’histoire, c’était produire davantage et mieux, pour se produire soi-même. L’économie faisait l’histoire ; le salut humain, l’humanité réconciliée avec elle-même, chez Marx comme chez Friedrich Hayek, passent par l’économie. Est-ce un hasard si la fin de l’histoire a été annoncée au moment même où c’en était fini de la croissance ? La question est posée. C’est même la plus urgente, car la réponse donnée par l’Union européenne, car la réponse donnée par les présidents successifs de Etats-Unis – « le mode de vie américain n’est pas négociable » – est non, non et encore non. Sans croissance, nous ne savons pas vivre. Sans croissance, nous ne sommes plus nous-mêmes – le gouvernement du désir ne fonctionne plus. La question ne porte pas sur des modalités de l’être, elle porte sur notre être même ; sans la croissance, nous ne sommes plus rien, le désir érigé par la croissance s’effondre, et l’être de désir avec lui. La question est même la plus vitale qui soit, car l’ordre mondial imposé par Wall Street, la City et les fonds d’investissement veut que la croissance réponde à tous les problèmes posés aux démocraties, fasse tomber les dictatures et en finisse avec les extrémismes…Le retour de la croissance n’est pas pour demain, et quelque chose pourrait être pire que la stagnation actuelle, ce serait le retour de la croissance et du prix à payer pour elle – la destruction qu’il signifierait. Et avec la disparition de la croissance comme forme souhaitable du devenir humain, ou comme investissement possible de l’espoir, c’est le gouvernement du désir qui s’épuise à ranimer des magies éteintes…

La déception comme régime économique et social…En sommes-nous là, déjà là ? Un élément récent, proprement inouï, incite à penser que oui. Cet élément, ce sont les taux d’intérêt négatifs. Depuis 2014, plus encore depuis le début de 2016, il en coûte de placer de l’argent.

[…] Le propre de la mondialisation est de s’employer à faire disparaître tout ce qui était, tout ce qui demeure, hors de régime du marché, du contrat et du prix.

[…] Nous vivons l’épuisement de l’individualisme libéral. Contre toute attente, le gouvernement du désir creuse la tombe de la révolution moderne. La déception qui étreint l’individu dépossédé, manipulé, formaté, et seul, restitue au pouvoir, à l’identité, à l’unité, leurs couleurs et leur attrait. Le désir change d’objet. La page est tournée ; jamais l’accès aux biens privés ne donnera ce qu’assuraient les biens publics et communs répandu à profusion par la nature, la culture et l’identité nationale – la certitude d’être ce que nous sommes. La liberté n’est pas là où l’individu se voit prescrit de la chercher. Ou plutôt, la déception devant les biens marchands, le commerce des chairs et de l’argent, l’isolement croissant portent le désir vers les fondements des sociétés humaines et de la possibilité même de l’existence individuelle…, la passion du « nous » et la foi partagée.

[…] Le prix à payer pour le gouvernement du désir, pour la paix par la croissance et l’abondance, pour l’économisme radical de l’Europe, a été le rétrécissement constant du champ du désir….

La bonne nouvelle qui résonne déjà au loin, dont le bruit se rapproche, est que c’en est fini du cavalier seul de l’Occident….Le temps du renversement du monde est proche. La décomposition des ordres techniques, comme l’OMC, le FMI, la Banque mondiale, L’Union européenne, le Tribunal pénal international, etc., s’accélère sous les coups de boutoir du désir politique et du réalisme national. C’en est fini de l’Occident comme fin de l’histoire, de la fin du politique, et du pilotage automatique des démocraties sans peuple.

C’est fini. Donc tout commence. La déception qui monte, le ressentiment qui s’entend, la colère qui gronde viennent d’un constat : la survie est en jeu…L’enjeu est là. Survie de la France, de l’Europe, de la civilisation de ce cap du contient eurasiatique qui s’est cru le monde, et qui l’a tenu un moment, mais qui meurt de ne savoir ses limites, ses frontières et sa clôture. L’idéologie du bien-être le condamne moins que la libération du désir infini, qui le réduit à ce qu’il n’est pas ; un marché de consommation, un bassin d’épargne, et des espaces à conquérir.

[…] Le gouvernement du désir individuel, en instaurant une infrastructure minutieuse, pénétrante, d’automatismes et de mécaniques, a débranché le pouvoir du gouvernement et la légalité de la légitimité ; les choses marchent, elles marchent même assez remarquablement, elles semblent même marcher toutes seules, d’un mouvement auto-entretenu, mais non seulement les dirigeants n’y sont pour rien, veulent-ils s’en mêler qu’ils ne font que s’empêtrer, illustrer leur impuissance, et confirmer l’ingouvernabilité de la société de l’individu qui ne marche décidément qu’au désir – et le désir n’y est plus…

… Pour que le désir étende son empire, il fallait en finir avec le politique comme pouvoir de soi sur soi. De même que la loi n’a plus besoin de se dire, de s’afficher, puisqu’elle est dans les codes, les systèmes, les badges, les péages, et qu’il est impossible de lui désobéir, de même la vie prescrite devait-elle être de plus en plus dans les algorithmes, les logiciels, dans les accès et les formats qui assurent le fonctionnement quotidien des fonctions vitales de la modernité – communiquer, se déplacer, payer, etc. Il ne s’agit plus de disserter sur la bonne vie et la quête du bonheur, il s’agit d’obéir aux incitations du système, et tout le reste sera donné par surcroît. Et il s’agit surtout de ne jamais se poser de questions – le bonheur comme la modernité sont dans l’absence de questions.

La fin d’un système ?

Le désir fondamental est politique. C’est le désir de survie, qui conditionne tous les autres. Et le gouvernement du désir qui vient est et sera politique, sera le gouvernement d’après l’individu, la croissance et l’économie, parce que ce sera le gouvernement pour la survie. La promesse criminelle de tout changer a détruit nos sociétés, nos attachements et jusqu’à nos raisons de vivre. …

…Nous allons vivre le passage du désir des choses qui s’achètent et se vendent vers des choses qui se transmettent, qui se donnent, et qui n’ont pas de prix…..

…Le gouvernement du désir individuel et marchand nous aura tenu un demi-siècle. C’est plus que le nazisme, le fascisme italien, autant que le communisme soviétique. Le maoïsme aura tenu plus longtemps, mais à l’étonnante condition d’une métamorphose qui lui a fait adopter le régime du désir sans rien avouer, sans rien trahir, mais en changeant tout. Qu’est-ce désormais que le parti communiste chinois, sinon le grand ordonnateur de la satisfaction d’un peuple qui a si longtemps été nourri de promesses plus que de riz ? …

…Un cycle s’achève, un autre cycle commence. La transformation démographique va l’aider, la conscience géopolitique renaissante en Europe aussi. Et le bruit de la guerre, tout proche désormais. Au terme d’un cycle qui a vu les préférences collectives balayées par les choix du consommateur, et la liberté politique sacrifiée gaiement à l’avènement de l’individu souverain, nous sommes prêts à renouer avec le désir fondamental, le désir qui court depuis les origines…Le désir politique…

…Nous avons à inventer, à deviner, à tracer un chemin dans une nuit que rien n’éclaire. L’innovation politique est en retard sur le monde de l’industrie, des services, et de la vie elle-même ; la révolution anthropologique qui a eu lieu sous l’égide du numérique, de la maîtrise du vivant et de la globalisation ne s’est pas accompagnée de la révolution du pouvoir et des formes politiques qu’elle appelle. »