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Bloc-notes 4

Journal 2021

Janvier 2021 – Rarement vœux ont été si retenus voire moroses après cette année noire. Et peu de raisons pour que la césure des « fêtes » y change quoi que ce soit. Nous avons donc démarré dans la grisaille générale, celle de la météo qui n’étonnera personne, celle de la population bousculée dans ses habitudes festives ou simplement sociales, celle enfin d’une vaccination anti-COVID qui, le moins qu’on puisse dire, ne semble pas partie sous les meilleurs auspices. Quand ça ne veut pas, ça ne veut pas : masques, tests et, maintenant, vaccins ! C’est pourtant la seule chance de s’en sortir, d’abord avec moins de décès, ensuite avec moins de casse sociale et économique. Puisque guerre il y a, paraît-il, je reproche au général en chef de n’avoir pas engagé tous ses moyens, y compris ses ultimes réserves, dans cette bataille décisive. Pour avoir abandonné l’étude du grec ancien, on en finit par ignorer le kairos, cette opportunité dont les anciens nous disaient qu’il fallait la prendre aux cheveux.

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ACTUEL 59 – Concept de sécurité et « haute intensité »

« Le retour du combat de haute intensité », tel est l’intitulé du dossier rédigé et publié par le G2S, groupe de généraux en retraite qui, encore proches de l’état-major, disposent d’informations techniques récentes. En l’occurrence, ce dossier se veut être une somme de réflexions sur les évolutions et perspectives des futurs conflits. Ces officiers généraux s’inquiètent donc du retour possible du combat dit de « haute intensité », ce niveau conflictuel étant, à leurs yeux, un marqueur de la guerre, une sorte de déterminant qui ferait passer la guerre au-delà d’un seuil, celui de l’intensité. Sans doute ont-ils adopté cette formule par anti-phrase et par contraste avec ce qu’on a appelé les conflits de basse intensité, ces « petites guerres » ou guerres en dentelle du XVIIIe siècle et, plus récemment, des conflits périphériques et lointains où, faute d’armes et/ou de combattants, il ne se passait pas grand-chose ou, alors, de façon sporadique et avec des pertes humaines limitées ; on y invoquait le slogan inconvenant de « zéro mort » comme pour exorciser ce que la guerre avait de scandaleux (selon les médias) : le risque pour le soldat d’y mourir. Lire la suite

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Bloc-notes 3 (extraits)

Journal du confinement (23 novembre – 15 décembre 2020)

Lundi 23 novembre – J’inaugure ici la quatrième semaine de confinement, mais nous en saurons plus demain soir où le Président doit nous décrire les prochaines étapes du chemin de croix. Je vais profiter de ce répit pour relancer le sujet abordé il y a quinze jours, cette histoire de « sécurité globale » qui enflamme les médias ces derniers temps. Puisqu’ils le prennent par le plus petit bout de la lorgnette – l’article 24 de la loi qui concerne l’image visuelle des forces de l’ordre -, je vais saisir cette occasion de remettre les choses dans ce qui, à mon avis, est leur ordre de préséance. Lire la suite

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Le grand bond universitaire chinois – SINOCLE – 25 novembre 2020

Le Geurs nouveau est arrivé. Geurs pour Global Employability University Ranking and Survey. Un indice mis au point par le cabinet français de conseil RH Emerging et l’anglais Times Higher Education (THE) qui dessine la cartographie mondiale de l’employabilité. En 10 ans la Chine est passée de la 11e place à la 5e place mondiale. Prenons les indices pour ce qu’ils sont, non pas la vérité mais la photographie vraisemblable d’un paysage à un moment T. Pour ce cru 2020 en pleine pandémie presque 10 000 dirigeants, de la grande entreprise à la start-up, ayant recruté cette année environ 300 000 étudiants dans plus de 20 pays et représentatifs d’une vingtaine de marchés différents ont voté afin d’évaluer 6000 écoles ou universités dans le monde.

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Bloc-notes 2 (extraits)

Journal de confinement – deuxième vague

Jeudi 29 octobre 2020 - En ce dernier jour de liberté de mouvement avant au moins un mois de réclusion, j’ai foncé jusqu’aux plages de Chiberta, assez encombrées de familles vacancières qui profitaient du spectacle de la mer et de ce répit qui leur était accordé avant de retourner chez elles pour s’y enfermer. Il est vrai que dans sa furie l’océan était aujourd’hui d’une grave beauté ; blanc d’écume sur plusieurs centaines de mètres, cadencé de rouleaux impressionnants, le monstre marin s’acharnait à submerger la côte. Colère qui vient directement d’Amérique mais qui échoue encore une fois sur les rives du golfe de Gascogne. Jusqu’à quand résisterons-nous à tous ces vents mauvais, ceux de l’oncle Donald le menteur ou ceux des faux sosies du Prophète, étroitement emmêlés de bouffées de ce virus moyenâgeux ? Lire la suite

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ACTUEL 58 – La logique des empires

et la possibilité d’une Europe

Derrière l’écran de fumée des événements internationaux, la vie du monde n’obéit pas seulement aux rapports de forces immédiats : elle est aussi animée par des arrière-pensées. En réponse à tous ceux qui prétendent sans en rien savoir que le « monde d’après » ressemblera à celui d’hier, ce qui a toujours été démenti dans le passé, il faut interroger l’histoire, ses sources et ses invariants, comme la très longue mémoire des peuples, leurs intérêts permanents et leurs obsessions pluriséculaires pour mettre en valeur les lignes de force des bouleversements en cours. Ceux des profondeurs ne se révèlent pas nécessairement par la houle en surface, mais la force et la nature des phénomènes en cours depuis vingt ans conduisent à penser que nous sommes les spectateurs/acteurs d’un changement de paradigme comme on en observe un tous les cent ou deux cents ans1. Lire la suite

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ACTUEL 57 – La Chine et le Monde

essai de compréhension

L’air des relations entre la Chine et une grande partie du monde se rafraîchissait depuis plusieurs années, mais la crise du coronavirus a entraîné un refroidissement sensible. C’est tout à fait surprenant de la part d’un pays aussi engagé sur les cinq continents et aussi dépendant du monde, proclamant fortement son multilatéralisme, alors que la communauté des 193 Etats, tous plus ou moins touchés par cette pandémie, aurait besoin d’entraide et de solidarité. A cet instant historique crucial, la Chine fait comme si cette catastrophe n’était pour elle qu’une opportunité, exploitant à fond la dualité du « weiti », ce mot chinois qui signifie crise en associant deux caractères, celui de danger et celui justement d’opportunité. On aurait aussi pu l’espérer plus discrète alors que, si l’épidémie est née chez elle de façon qu’on veut croire fortuite, ce sont ses atermoiements et ses défaillances qui ont permis qu’elle s’échappe et infecte le monde entier. La responsabilité de la Chine est donc manifeste mais elle la rejette avec vigueur comme s’il lui était impossible d’accepter la réalité et de la regarder en face. Lire la suite

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Les deux visages de la Chine

Les apparences obscurcissent la réalité, en Chine plus que partout ailleurs. Ce pays n’est pas par hasard la civilisation du « non-agir » et celle du « masque », qu’il soit sanitaire ou théâtral. Mais, pour une première fois confrontée à un dilemme qu’elle camouflait autrefois sous la fatalité, la Chine se révèle telle que le XXe siècle l’a modelée, faussement révolutionnaire, naturellement cynique et profondément fragile. Le monstre économique qui a surgi du néant en quelques décennies est un cousin éloigné du Loch Ness, prêt à retourner dans les abîmes si la tourmente continue de secouer le monde.

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ACTUEL 56 – Crise sanitaire et guerre antivirale

Ainsi la guerre est-elle déclarée à cet insolent coronavirus qui perturbe nos vies, sociales et économiques, et met en cause nos libertés. On permettra donc au « stratégiste », même s’il est marginalisé en l’occurrence, de joindre son analyse aux expertises qui font chorus dans les médias. Sans vouloir en quoi que ce soit polémiquer sur l’emploi d’un vocabulaire guerrier pour tenter de faire prendre conscience aux Français, volontiers désinvoltes, de la gravité de la situation sanitaire, il me semble toutefois que ce choix est inapproprié, non seulement parce qu’il est décalé mais surtout parce qu’il pourrait s’avérer dangereux. La guerre est un « état d’exception » dont nous avons oublié l’extrême gravité et la banaliser ainsi à l’occasion d’une « crise » sanitaire aussi sérieuse soit-elle est un abus de langage que nous devrions éviter. On invoque ad nauseam la célèbre phrase de Camus sur les erreurs de dénomination : « mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde ». Certes, mais ne faisons pas pire en risquant de tromper les hommes ! Notre vocabulaire ne manque pourtant pas des richesses sémantiques qui permettraient de signifier les choses et les situations ; et, si nous y réfléchissions sérieusement, nous serions sans peine capables de mieux définir cette crise. Mais l’époque pousse aux exagérations et nous avons tellement tendu la corde que plus rien ne vaut ; il faudrait alors aller aux extrêmes pour sembler dire la réalités des choses.

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Sinocle.info – les bonnes pages

1/ Le marteau et l’algorithme

Le narrateur, de retour du Changtang le haut-plateau tibétain qui s’étend du Ladakh à la province du Qinghai, fait une escale à Chengdu, capitale du Sichuan, avant de reprendre l’avion pour Paris. Dernier chapitre de la Panthère des neiges, dernier livre de Sylvain Tesson : « Nous atteignîmes le parc. La fête foraine était réussie. Les haut-parleurs pulsaient, la vapeur des beignets enveloppait les clignotements. Même Pinocchio aurait été dégoûté. Les panneaux n’omettaient pas d’afficher la propagande du Parti. Le peuple chinois avait perdu sur les deux tableaux. Politiquement il subissait la coercition socialiste. Economiquement il tournait dans la lessiveuse capitaliste. Il était le dindon de la farce moderne, marteau et algorithme sur le fanion ». Lire la suite